Méthode basée sur les interactions positives entre le sénior, l’animal, et le professionnel, la médiation animale a pour but d’améliorer le quotidien de nos résidents. Retour d’expérience sur cette relation triangulaire avec les témoignages de quatre Responsables de la Vie Sociale et d’une intervenante extérieure.
« La médiation animale est une vague de tendresse »
Adeline, RVS à l’EHPAD Maisonnée de Martigues
A quelle fréquence organisez-vous des ateliers de médiation animale à destination de vos résidents ?
J’organise depuis 2 ans des ateliers de médiation animale à l’EHPAD Maisonnée de Martigues avec des intervenants extérieurs formés et diplômés, à raison d’un atelier par mois de zoothérapie avec des chiens, des poules, des cochons d’inde…et depuis 1 an un atelier d‘équithérapie tous les 3 mois.
Quels sont les bienfaits de la médiation animale ?
La présence de l’animal est apaisante, distrayante et source d’émotions.
Au fil des rencontres, les gestes se font plus tendres, des liens se créent. Par exemple, un résident s’est attaché tout particulièrement à une poule nommée Vénus. Pour l’équithérapie, le rapport est plus « individuel ». Quand un résident n’est pas présent à l’animation, c’est le poney qui va à lui (visite en chambre ou dans les unités spécialisées). En tout cas l’émotion est toujours au rendez-vous.
"Ici, la médiation animale est l’affaire de tous ! "
Isabelle, RVS à l’EHPAD Maisonnée Boisvallon ( à Ceyrat à côté de Clermont-Ferrand)
A l’EHPAD Maisonnée Boisvallon, la médiation animale est mise en pratique depuis 2017. Tout a commencé avec Malao, un bouledogue français vivant à la résidence. Puis Moka, le Shitzu de l’ancienne RVS de l’établissement a pris le relais pour tenir compagnie aux résidents quotidiennement. Aujourd’hui, c’est Nestor un Jack Russel de tout juste 4 ans, qui est devenu le nouveau chouchou des résidents. Avec le départ de Fleur et donc de son Shitzu, les résidents ressentaient un manque et réclamaient une présence animale. C’est pourquoi, nous avons monté avec Jeanne, jeune infirmière ayant réalisé une thèse de fin d’études sur la médiation animale, ce nouveau projet.
Nous avons mis en place une relation triangulaire entre les résidents, les collaborateurs et l’animal. L’animal joue le rôle de tiers impartial, indépendant et altruiste. L’ animal est une troisième entité non iintrusive qui n’attend rien du résident. Sa mission consiste simplement à être présent.
Par sa présence, il va apaiser les résidents qui vont focaliser leur attention sur lui plutôt que sur leurs maux. Auprès des résidents grands dépendants, il va remplir une mission d’éveil des sens en apportant une présence différente de celle de l’humain. Un touché doux pour les caresses, un langage différent…
Une fois par semaine, Nestor rend visite aux résidents dans leur chambre au côté d’un collaborateur et très souvent accompagné de sa balle pour jouer. Grâce à cette proximité, les seniors tissent des liens privilégiés avec l’animal. Je remercie Jeanne, c’est une chance de pouvoir travailler avec elle !
« L’animal ne se nourrit pas d’attentes idéalisées envers les humains, il les accepte pour ce qu’ils sont et non pas pour ce qu’ils devraient être »
Levinson : Psychologue américain, précurseur de la zoothérapie
"Plus que de la médiation animale nous pratiquons la câlinothérapie"
Laëtitia, RVS depuis 15 ans à La Pergola
Comment la médiation animale s’est-elle mise en place au sein de votre établissement ?
Depuis mai 2018, l’EHPAD La Pergola travaille en collaboration avec l’association « Lam’ain tendue » qui est spécialisée dans la médiation animale avec des lamas. Jérôme, le représentant de l’association se déplace à la Pergola une fois par trimestre.
Avez-vous eu des appréhensions lors du lancement des 1ères séances ?
Oui, j’avais des appréhensions concernant notamment la propreté et les idées reçues sur les lamas qui crachent. Mais Jérôme m’a tout de suite rassurée. Ses animaux sont domestiqués et éduqués pour travailler. Dès qu’il leur enfile leur collier, ils se mettent en situation professionnelle et lorsqu’il l’enlève et les laisse en liberté dans le pré, ils retrouvent leur état plus sauvage.
Qu’apportent ces ateliers aux résidents ?
La première fois que Jérôme est venu avec ses lamas, nous avions fait la surprise aux résidents sans leur dire de quel animal il s’agissait. Nous avions juste affiché l’information : « Médiation animale tel jour à telle heure ». Quel ne fut pas leur étonnement !
Plus que de la médiation animale nous pratiquons la câlinothérapie car se sont des animaux très dociles et doux tant sur le plan physique au touché que sur le plan caractériel. Leur attitude apaise les résidents. Ils prennent le lama dans leurs bras et connectent leur respiration à celle de l’animal. Il a une véritable capacité pour recevoir de l’attention et en donner en retour. C’est tellement inattendu venu d’un lama que ces instants sont d’autant plus magiques !
Pour le moment nous pratiquons essentiellement la médiation animale avec un objectif récréatif. C’est un échange affectif. Mais je travaille aussi sur un projet visant un objectif thérapeutique. Avec Jérôme nous réfléchissons à la mise en place d’un parcours d’agilité que les résidents devront effectuer en promenant le lama. Il s’agira alors d’observer la progression d’un petit groupe de résidents (six) sur 2 à 3 mois.
Une anecdote ?
J’en ai beaucoup ! Par exemple, Carlito, le lama préféré de nos résidents est une vraie star. Pour se balader dans l’établissement, il prend l’ascenseur et « enclenche la marche arrière » pour en sortir une fois arrivé à l’étage souhaité. Cela nous fait beaucoup rire ! En 2019, il a aussi participé à l’arbre de Noël avec les enfants du personnel en volant la vedette au père Noël ! Il portait des paniers chargés de cadeaux !
« Penser aux animaux pour panser ses souffrances »
Y a-t-il un animal auquel les résidents sont plus réceptifs ?
Curieusement, les perruches sont l’animal auquel les résidents sont le plus réceptifs. Il faut dire que les perruches de Sandrine travaillent avec une grande attention. Les résidents peuvent leur donner à manger individuellement. Elles se posent sur leur tête ou l’épaule ou même la main et comme récompense pour les résidents, elles leur chantent une chanson dans l’oreille. Beaucoup d’émotion se dégage de ces séances.
Myriam, RVS depuis 2016 à l’EHPAD Le Val Fleuri
Comment mettez-vous en pratique la médiation animale au sein de l’EHPAD VAL Fleuri ?
J’organise des ateliers de médiation animale depuis 4 ans et au regard du succès rencontré, j’ai 3 types d’approches différentes mais complémentaire qui me permettent de proposer un atelier par semaine.
Je travaille avec l’association « pAnser animal » représentée par Sandrine HENGY mais aussi avec une intervenante extérieure, qui vient nous rendre visite accompagnée de ses perruches, cochon d’inde, chiens, lapins et prochainement un âne, avec une art thérapeute qui conjugue art thérapie et médiation animale (plumes d’oiseau pour des ateliers créatifs par exemple), enfin, j’ai moi-même suivi une formation de médiation animale, dans un autre établissement.
Les animaux permettent de travailler l’émotionnel mais aussi la psychomotricité. Dans les Unités de Vie Protégées, on remarque que les personnes se sentent apaisées. L’animal diminue leur angoisse et souvent le soir, le coucher est plus facile.
C’est aussi un moyen de stimuler la mémoire en ravivant des souvenirs.
Autre bienfait : on observe que les personnes fermées ou réactives, s’ouvrent et s’épanouissent au contact d’animaux.
« La médiation animale : une façon de travailler en douceur sans que l’on s’en aperçoive. »
Jessica, intervenante extérieure à l’EHPAD Côte de Nacre
Ancienne aide-soignante en maison de retraite qui a dû se reconvertir à la suite d’une hernie discale, il y a 6 ans, Jessica s’est formée auprès de l’institut « Agatée », puis a créé une association « Au fil des pattes ».
Auprès de quels publics travaillez-vous ?
La médiation animale touche tous les publics des enfants, aux seniors en passant par des individus atteints de troubles ou maladies. Je dois simplement adapter mes séances en fonction du public et de l’objectif visé. Par exemple, je peux intervenir auprès d’un enfant violent pour l’apaiser, lui apprendre à maitriser son humeur et ses gestes grâce à la présence de l’animal : un être inoffensif.
Auprès des résidents de l’EHPAD, les principaux objectifs sur lesquels je travaille sont tout d’abord la valorisation : revaloriser le résident, qu’il se sente utile, impliqué, aimé…
Ensuite,nous recherchons la communication, la création d’un lien avec autrui que ce soit l’animal, le personnel accompagnant ou les autres résidents. Puis l’amélioration de la mobilité et de la mémoire (effet Madeleine de Proust : les résidents ont presque tous déjà eu un animal de compagnie dans le passé). Enfin, nous utilisons aussi la médiation animale, pour accompagner un résident en fin de vie, lorsque la famille nous sollicite.
Avec quels animaux travaillez-vous ?
J’ai des lapins, cochons d’inde, rats, poules, chiens et actuellement je forme des oies. Ce sont des animaux maltraités et/ou abandonnés que je récupère. Les associations me contactent et je me mets à former l’animal. Je lui apprends à ne plus avoir peur de l’humain, à accepter les caresses etc… Et j’ai remarqué que les résidents sont deux fois plus touchés et attentionnés, doux dans leurs gestes en apprenant le passé de l’animal. Ils veulent connaître son histoire.
Pourquoi ce nouveau métier vous plaît-il autant ?
Car il n’y a pas de routine, c’est un travail merveilleux. Si je devais comparer avec mon ancien métier d’aide-soignante, je dirais que je ne bénéficie que du côté positif de la relation avec le résident. Je peux prendre mon temps, je ne suis jamais pressée.
Avez-vous des anecdotes à nous raconter ?
J’ai travaillé avec une aide-soignante qui connaissait des difficultés avec un résident lors de sa toilette : il était agressif. Ce monsieur étant très réceptif aux séances de médiation animale, l’aide-soignante s’est mise à lui en parler lors de la douche pour l’apaiser. Et cela a fonctionné, il était captivé par ce sujet et aimait raconter ses moments passés aux côtés des animaux.
J’ai aussi connu une résidente qui (en théorie) ne marchait plus et qui un jour s’est levée pour venir promener le chien avec moi. Dans le même esprit, une dame refusait de marcher lors de ses séances de kinésithérapie (rééducation) mais acceptait de le faire pour promener un furet.
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